Actualité 20 ans après le premier Solidays, les jeunes méconnaissent VIH et Sida

Isabelle Fagotat Isabelle Fagotat
Publié le 19-06-2018

En bref

  • Le festival Solidays se tiendra à Paris du 22 au 24 juin. Il fête cette année sa vingtième édition. Organisé par Solidarité Sida, il a vu le jour en 1999 pour sensibiliser l’opinion sur le VIH et le Sida. Pourtant, en 2018, les jeunes sont moins bien informés que leurs aînés. État des lieux.
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Un couple de dos qui se tient la main. Crédit : Vladimir Kudinov

20 % des 15-30 ans s’estiment mal informés sur le VIH et le sida, selon un sondage Ifop pour Sidaction paru en mars 2018. 19 % des jeunes interrogés estiment par exemple que la pilule contraceptive d’urgence peut empêcher la transmission du virus, soit 9 % de plus qu’en 2015.  

Quand on avait 20 ans dans les années 1990, on savait que la « pilule du lendemain » ne protégeait pas contre le VIH. On connaissait les risques liés au virus du Sida. On savait que si l’on contractait le VIH, l’issue était souvent fatale. On savait que pour s’en prémunir, il fallait utiliser un préservatif.  Aujourd’hui, 37 % des lycéens et 54 % des étudiants déclarent ne pas utiliser systématiquement un préservatif, comme l’indique la dernière enquête santé de la mutuelle étudiante Smerep.
« Si dans les années 1990, nous étions informés voire surinformés sur la question, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Beaucoup de jeunes ne sont par exemple pas au courant des modes de transmission. Certains pensent que le VIH se transmet par la salive, une piqûre de moustique voire même en serrant une main ! », explique Aurélien Beaucamp, président d’Aides.

« Tout au long de ma scolarité (j’ai suivi un cursus en école de commerce), je n’ai jamais été informé sur le VIH et le Sida. Ce serait bien qu’il y ait des sessions d’information dans les classes. Dès qu’il faut parler de sexe à des mineurs, c’est tabou et s’il faut parler de maladies sexuelles, c’est pire. C’est parce que c’est tabou que les gens sont mal informés », regrette Rémy, 26 ans.
C’est aussi ce qui ressort d’un rapport du Haut conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes paru en juin 2016. Selon lui, l’éducation à la sexualité en milieu scolaire reste « parcellaire, inégale selon les territoires car dépendante des bonnes volontés individuelles. Elle est, selon le point de vue de certain.e.s acteur.rice.s, inadaptée aux réalités des jeunes ».

Selon le sondage Ifop pour Sidaction, 21% des jeunes interrogés pensent que le virus du Sida peut se transmettre en embrassant une personne séropositive, 18 % pensent que la transmission peut se faire en entrant en contact avec la transpiration. Autant d’idées fausses véhiculées sur des forums et certains sites de désinformation.
« Des fake news circulent sur Internet qui expliquent que le sida se transmet par les baisers, les brosses à dent, à la piscine, aux toilettes ou en partageant des couverts ou par les moustiques, ce qui est évidemment absolument faux », déplore Eric Vandemeulebroucke, médecin au conseil départemental de la Seine-Saint-Denis.

 « Je pense qu’il y a 20, 30 ans, quand on parlait du VIH, on avait peur de la maladie, de mourir. Aujourd’hui, on sait que l’on peut vivre avec, on a juste peur d’être médicamenté à vie. On est passé d’une maladie grave à une maladie contraignante », constate Rémy.
Alors qu’il y a 30 ans, les traitements pour freiner l’évolution de la maladie étaient inefficaces, aujourd’hui, une personne séropositive, si elle prend ses médicaments de manière sérieuse, peut vivre avec le VIH sans contaminer son partenaire. Ces traitements sont aussi efficaces pour limiter les risques de transmission mère-enfant. « Si une femme enceinte est traitée, le VIH ne passe pas à son bébé. Comme en France, les femmes enceintes sont très suivies, le risque de transmission par cette voie est extrêmement faible », explique Agnès Duhamel, médecin en chef du Centre de prévention et de santé de Montreuil-sous-bois.

Pourtant, malgré ces évolutions positives en matière de traitement, beaucoup de préjugés demeurent vis-à-vis des personnes séropositives. « Les gens continuent d’avoir une mauvaise image des personnes séropositives. Chez les jeunes, c’est encore pire : ainsi 30 % des 15-25 ans déclarent qu’ils seraient mal à l’aise s’ils apprenaient qu’un collègue est porteur du VIH, contre 16 % pour la population tout âge confondu. La raison à cela c’est que les plus de 30 ans sont mieux informés que les 15-25 ans », regrette Aurélien Beaucamp.

Faute d’information dans les établissements scolaires, les jeunes se renseignent auprès de leur proches ou de leur cercle d’amis. « J’ai rencontré une personne séropositive qui m’a expliqué qu’il y a aujourd’hui des traitements plus performants et qui m’a parlé de la Prep, un traitement pré-exposition qui permet d’avoir des rapports sans préservatif sans contracter le VIH. Le milieu gay me semble mieux informé car la maladie y est plus présente », souligne Rémy. Il existe pourtant des lieux ressources pour se faire dépister comme les centres d’information de dépistage et de diagnostic (Cegidd) mais ils ne sont pas forcément connus des jeunes. Quant au médecin de famille, par pudeur ou par gêne, il n’est pas forcément consulté pour ce type de sujet.

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