Conseils Les femmes toujours minoritaires en écoles d’ingénieurs

Isabelle Fagotat Isabelle Fagotat
Publié le 06-01-2016

En bref

  • Les études d’ingénieurs peinent encore à attirer les filles. Elles représentent moins de 30 % des effectifs des écoles. En cause : des préjugés qui ont la vie dure. 
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Les filles continuent de bouder les études d’ingénieurs Crédit : Green Chameleon

En 2017-2018, il y avait 27,2 % de femmes parmi les 141 973 élèves-ingénieurs. Si dans les années 1970, ce taux n'était que de 10 %, "il ne progresse que très lentement. Entre 2000 et aujourd'hui, il n’a augmenté que de 10 %. Cela est lié à des stéréotypes persistants et à des phénomènes de reproduction sociale. Les filles ne se rendent pas compte à quel point les métiers d’ingénieur ont évolué. Les actions mises en place par les écoles, les associations et les entreprises font évoluer les mentalités mais cela prend du temps", analyse Pascale Ribon, vice-présidente de l'association Ingénieurs et scientifiques de France (IESF).

Au lycée, les filles ont tendance à croire qu’elles n’auront pas les compétences pour intégrer une école d’ingénieurs, qu’elles n’ont pas un profil assez scientifique. 
En réalité, elles pratiquent souvent l’autocensure.
L'étude réalisée en 2010 par les chercheurs en psychologie 
Isabelle Régner et Pascal Huguet le prouve.
Entre 2007 et 2009, ils ont demandé à près de 500 élèves de 6e et de 5e de reproduire la figure complexe de Rey-Osterrieth. Quand le test était présenté comme un exercice de géométrie, les garçons réussissaient mieux que les filles. Lorsqu'il était présenté comme un exercice de dessin, les filles s’en sortaient mieux. 

Autre frein : des stéréotypes socialement ancrés, que ce soit au niveau des familles ou du corps professoral. Après le bac, les filles sont plus volontiers orientées vers des filières littéraires ou économiques que scientifiques. Elles sont par exemple moins nombreuses à opter pour une prépa scientifique qui est pourtant la voie royale pour intégrer une école d’ingénieurs. "Même si le taux progresse, il n’y a actuellement que 30 % de filles dans les classes préparatoires scientifiques. C’est dommage, car les employeurs les plébiscitent. Pour deux profils identiques, ils recruteront prioritairement une fille", souligne Hervé Riou, président de l’Union des professeurs de sciences et techniques industrielles. 

Certains domaines de spécialisation attirent cependant beaucoup plus les filles, c’est le cas de la biologie, de l’agronomie ou de la chimie. Fondée par une femme, Florence Dufour, en 1992, l’École de biologie industrielle (EBI) compte en moyenne 80 % d'étudiantes dans ses effectifs. Dans les écoles d'agronomie, le taux de femmes dépassent généralement les 70 % quand il a du mal à atteindre 20 % dans les écoles spécialisées dans l’aéronautique et l’automobile, l’électronique, la mécanique, les technologies de l’information ou le BTP.

Autre problème : plus les écoles sont renommées, moins elles sont féminisées, comme le soulignait un rapport du Contrôle général économique et financier (CGEFI) paru en juillet 2015. L’École des mines et l’École polytechnique qui ont été parmi les dernières écoles à admettre des femmes dans leurs rangs (en 1970 pour la première, en 1972 pour la seconde) comptent moins de 20 % de femmes parmi leurs effectifs. 

Mais les établissements cherchent à faire bouger les lignes. Plébiscitées par les entreprises, les ingénieures deviennent un enjeu pour les écoles qui multiplient les actions pour les attirer. En collaboration avec des associations comme Pasc@line ou Elles Bougent, elles font notamment intervenir d’anciennes étudiantes qui viennent présenter leur métier à des collégiennes et des lycéennes. En ayant une idée précise et concrète des missions d'une ingénieure et de la diversité des métiers qu'elle peut exercer, des vocations se font jour.

Femmes & Sciences, Femmes Ingénieurs, Girlz In Web, Girls in Tech, Wax Science… Il existe de nombreuses associations qui cherchent à rétablir un équilibre hommes-femmes dans les filières scientifiques et techniques. C'est notamment le cas de Wax science : "Nous intervenons auprès des élèves de 3e ou de 2nde pour présenter la science sous un angle ludique et pour déconstruire certains stéréotypes. Nous leur faisons prendre conscience des clichés qui sont véhiculés dans la publicité et les médias. Nous vivons dans un monde extrêmement masculin où l’on met plus en confiance les garçons que les filles. Il est important que les lycéennes et collégiennes en aient conscience car c’est à cet âge-là que l’on choisit son orientation", explique Mélanie Souchet, ingénieure et membre de Wax Science.

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