Actualité « Story Killers », quand un groupe international de journalistes lutte contre la désinformation
En bref
- Ils sont une centaine de journalistes, issus de trente médias internationaux, à dévoiler une vaste enquête de désinformation à travers le monde, « Story Killers ». Après six mois de travail, ces révélations montrent l’impact de l’industrie de la désinformation, qui menace les médias et les organisations démocratiques.
Gauri Lankesh. Le 6 septembre 2017, son nom se retrouve dans tous les médias internationaux. La veille, la journaliste indienne, notamment connue pour sa lutte contre la désinformation venant du parti d’extrême droite de son pays, est assassinée sur le pas de sa porte. À l’aube de publier un éditorial engagé intitulé « À l’ère des fake news », Gauri Lankesh est réduite au silence éternel. Cinq ans après, une centaine de journalistes ont repris son combat pour publier une enquête sur les réseaux de désinformation, ce 14 février 2023.
La désinformation, qu’est-ce que c’est ?
Désinformation, mal-information, mésinformation, fake news ou fausse nouvelle, en bon français… Tous ces termes reviennent régulièrement dans l’actualité, sans qu’on ne sache réellement la signification. La grande différence entre les trois termes vient de l'intention initiale. Avec la désinformation, il s'agit de diffuser une fausse information dans le but de manipuler ou de tromper une cible. La mésinformation revient à effectuer la même action, c'est-à-dire publier un faux propos, mais cette fois-ci sans mauvaise intention. Enfin la mal-information est la publication d'un fait réel, mais de manière exagérée ou faussée. Là encore, l'intention reste de porter préjudice à quelqu'un.
L’enquête Story Killers soulève l’utilisation majeure de la désinformation qui, comme le rappelle le journaliste enquêteur Frédéric Métézeau, « tue et affaiblit la démocratie ». Des ingérences au sein de différentes élections à travers le monde à la diffusion de fake news dans les médias, les phénomènes de désinformation sont de plus en plus nombreux. Un article publié dans Le Monde détaille quelques exemples d’actions : « piratage, création de faux documents, réseau gigantesque de faux comptes sur les réseaux sociaux… ».
Des ingérences au sein des médias français
Un des exemples marquants de cette investigation demeure la révélation de fausses informations diffusées sur la chaîne BFM-TV, par le présentateur Rachid M’Barki. L’enquête Story Killers révèle que le journaliste diffusait des informations obtenues via une « connaissance », et sans les faire valider au préalable par ses responsables. Il est question ici de « brèves douteuses, à la gloire, notamment, du général soudanais Mohammed Hamdan Daglo, dit « Hemetti », ou vantant les mérites du « Sahara marocain », appellation connotée utilisée par Rabat pour revendiquer la souveraineté, très contestée, sur le Sahara occidental », selon Le Monde. En réalité, ces données venaient de l'agence de désinformation israélienne « Team Jorge ». Le présentateur Rachid M’Barki certifie ne pas avoir reçu de rémunération en échange de ces publications.
Forbidden Stories, continuer l’enquête des journalistes tués
À l’origine de cette enquête se trouve un collectif de journalistes fondé en 2017. Appelé « Forbidden Stories », ce réseau a été créé sur une promesse : « Ils ont tué le messager. Ils ne tueront pas le message ». Les membres se donnent pour mission de continuer le travail des journalistes menacés ou assassinés, partout dans le monde. Pendant six mois, une centaine de professionnels issus d’une trentaine de médias, dont Radio France et Le Monde, ont travaillé ensemble pour terminer le travail de Gauri Lankesh.