Actualité Tik-Tok, Instagram, YouTube : les hommes dominent, les femmes subissent
En bref
- La moité des publications sur Instagram véhiculent des stéréotypes féminins. À partir de l’analyse des 100 contenus les plus vus sur YouTube, TikTok et Instagram, le Haut conseil à l’égalité (HCE) dresse le constat alarmant d’un traitement préoccupant accordé aux femmes. Et met en cause la responsabilité des plateformes et d’une filière du numérique dominée par les hommes.
Sur les réseaux sociaux, les femmes cantonnées à des stéréotypes de genre
« Cinq ans après le mouvement #MeToo né sur les réseaux sociaux, l’image des femmes en ligne n’a pas connu de révolution », conclut le rapport du Haut conseil à l’égalité (HCE), intitulé La Femme invisible dans le numérique : le cercle vicieux du sexisme. Si les consciences s’éveillent peu à peu dans la société, les pratiques sur les réseaux sociaux ne suivent pas. Invisibilisation, stéréotypes de genre, diffusion de la violence symbolique et physique envers elles : les femmes se trouvent triplement impactées, dénonce le HCE qui a passé au crible les 100 contenus les plus vus sur YouTube, TikTok et Instagram.
Sur YouTube, « un monopole masculin » véhicule des « valeurs virilistes ». Ainsi, la plateforme ne recense que 8 % de vidéos gérées, ou cogérées, par des femmes et 24 % des contenus comportent des éléments de violence. Les femmes représentent seulement 34 % des personnages présents dans les 100 vidéos les plus regardées sur YouTube. Si Instagram accueille davantage de créatrices de contenus – 4 femmes figurent dans le top 10 - elles demeurent sous-représentées au sein des publications. 52 % des personnages principaux sont occupés par des hommes, 44 % par des femmes. Celles-ci restent surreprésentées dans les thématiques liées à l’intime, avec une « surabondance de contenus personnels mettant en scène des familles et des couples idéalisés […]. Leur apparence physique est fortement mise en avant, de même que leurs émotions », relève le rapport. Une perpétuation de l’assignation de la femme au foyer en somme. Le couple hétérosexuel y est d’ailleurs érigé en modèle par nombre d’influenceurs.
Et ce n'est guère mieux sur TikTok où, sur les 100 contenus décortiqués, seul un tiers est géré ou cogéré par des femmes. « Le nombre de représentations dégradantes des femmes atteint 42,5 % » parmi les contenus humour et divertissement du géant chinois.
Les femmes invisibles dans la filière du numérique
Qu’est-ce qui explique cet état de fait ? Il faut remonter à la source selon le HCE : les formations dans le numérique restent encore très largement masculines et il y règne « une forte culture sexiste ». En 2020, les femmes représentaient seulement 29 % des effectifs du numérique et 16 % dans les métiers techniques, selon des données de la Fédération Syntec. Faute de modèles ou d’encouragements lors de l’orientation scolaire, les jeunes filles s’engagent peu dans les voies scientifiques, encore moins dans le numérique. Le rapport cite les chiffres du Gender Scan selon lequel seulement 7 % des adolescentes déclarent avoir envie de s’orienter dans un secteur lié au numérique contre 29 % des garçons. Résultat : les plateformes et leurs algorithmes sont essentiellement conçus par des hommes.
Les réseaux sociaux ne constituent pas uniquement des espaces virtuels où se perpétuent les inégalités entre femmes et hommes. Ils en sont le moteur. Un cercle vicieux auquel le HCE souhaite mettre fin. L’instance appelle notamment à la mise en place d’une auto-évaluation annuelle des plateformes, placée sous l’égide de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). Elle recommande aussi la mise en place de quotas de filles dans les filières du numérique ainsi qu’un système de bonification sur Parcoursup. Suffisant pour changer la donne ? Affaire à suivre.