Actualité Paris sportifs et coupe du monde : les jeunes ont été les victimes de « pratiques abusives »

Florian Mestres Florian Mestres
Publié le 13-01-2023

En bref

  • Avec 615 millions d'euros pariés en ligne en France, la Coupe du monde 2022 au Qatar a battu un nouveau record. Les publicités de ces entreprises de jeux d'argent, qui ciblent « particulièrement les jeunes », sont jugées « abusives » par Addictions France. 
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D’après Santé Publique France, 72% des parieurs ont moins de 35 ans. Crédit : Pexels

Un nouveau record a été battu. Pas du nombre de buts encaissés pendant le Coupe du monde de football 2022, mais des sommes engagées en paris sportifs. Selon l'Autorité nationale des jeux (ANJ), près de 615 millions d’euros ont été dépensés en France. Par comparaison, c'est 68% de plus que pour le Mondial 2018 et 46% de mieux que l'Euro 2021. 

Pour l'association Addictions France c'en est trop et il est grand temps de dénoncer les « pratiques abusives visant particulièrement les jeunes » dont se rendent coupables les opérateurs de paris sportifs en ligne. D’après Santé Publique France, 72% des parieurs (en ligne ou non) ont moins de 35 ans. En dépit de l'interdiction des jeux d'argent et de hasard pour les mineurs, l'ANJ estime que plus d'un tiers des 15-17 a déjà misé

Et pour séduire ce jeune public, les entreprises de paris en ligne investissent les espaces chers au jeunes générations. Sur les réseaux sociaux, elles adoptent les codes de la culture manga, partagent des mèmes d'actualité (image humoristique en ligne), diffusent de fausses informations à propos d'un match en direct... Tout est bon pour capter l'attention, quitte à s'attirer les foudres de certains. Après une mauvaise « blague » de l'entreprise Winamax sur son père, Wilfrid Mbappé, le champion du monde 2018, a répliqué d'un tweet alertant sur le « danger des paris en ligne » et leur manque « de limite » . 

Mais qu'importe, car Winamax s'offre en parallèle les services promotionnels de l'influenceur Mohamed Henni (suivi par 1,5 million de personnes sur Instagram) quand son grand concurrent Betclic réplique avec Bastos (1,1 million d'abonnés sur Instagram). « Pour toucher leur cible, ces entreprises mettent en avant l'idée d'une possible ascension sociale grâce aux gains éventuels des paris. Mais en réalité, et le Mondial 2022 l'a bien montré, il est extrêmement compliqué et aléatoire de prédire le gagnant d'une rencontre, le score ou le nom des buteurs. Au final, ceux qui tirent des bénéfices de ces paris sont très peu nombreux », met en garde Bernard Basset, président d’Addictions France. Et tant pis pour les autres. 

Ainsi, selon l'association S.O.S Joueurs, 70% des parieurs se trouvent en situation d’endettement auprès de leur banque. Et il faut dire que les sollicitations alléchantes ne manquent pas. Les sociétés de paris en ligne multiplient les opérations de recrutement comme la sempiternelle offre de bienvenue : 200 euros de mises offerts pour toute inscription sur le site. Et ça marche, notamment auprès des jeunes des quartiers populaires très convoités par ces sociétés. 

« Mets à l’abri la daronne », « Grosse cote, gros gain, gros respect », campagne « roi du quartier », Winamax a fait des jeunes des quartiers sa cible favorite. Si bien qu'une semaine avant la Coupe du monde au Qatar, le département de Seine-Saint-Denis avait d'ailleurs lancé une campagne de prévention contre l'addiction aux paris en ligne.  

Pour garantir une protection accrue des consommateurs face au risque d'accoutumance, l'association Addiction France plaide pour une « loi Evin [texte relatif au tabagisme et à l'alcoolisme] spécifique aux jeux d'argent ». « Jusqu'à présent, le gouvernement ne semble fonctionner que sur un mode idéologique libéral : il ne faut pas gêner la liberté des entreprises, lesquelles sont seulement invitées à s’autoréguler », déplore Bernard Basset.

Prochain rendez-vous sportif d'ampleur, a fortiori dû à son organisation en France : la Coupe du monde de rugby, qui démarrera le 8 septembre 2023. L'occasion pour les associations de prévention aux addictions aux jeux d'argent de rester vigilantes quant aux nouvelles stratégies publicitaires à venir. Il y a fort à parier que les sites internet de paris sportifs rivalisent d'imagination pour transformer l'essai réussi avec le football sur le terrain du rugby.   

Pour Bernard Basset, en plus des risques d'addiction aux paris, il faudra rester attentif à la forte consommation d'alcool liée à cet évènement : « C'est à ce niveau-là qu'on a eu une plus grande inquiétude cet automne ». Gare à la « troisième mi-temps ! » 

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