Reportage Bacs pro industriels : des filières porteuses mais mal-aimées

Valérie François Valérie François
Publié le 21-03-2018

En bref

  • Les bacs pro sont souvent méconnus ou perçus comme une voie d'orientation par défaut, destinés aux élèves en difficulté scolaire. Pourtant les formations professionnelles du secteur industriel offrent de réelles perspectives de carrières évolutives associées à des salaires plutôt attractifs. Mais en raison de leur manque de notoriété et de leur mauvaise image, de nombreux bacs pro industriels manquent d’élèves. Reportage au lycée professionnel Vauquelin à Paris.
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bacs pros industriels Crédit : VF

« Je ne comprends pas comment l’on peut encore dire aujourd’hui que le bac pro, c’est un bac pour les nuls ! C’est vrai le niveau des matières générales n’est pas aussi élevé que celui d’un bac général mais c’est normal le bac pro forme à un métier. C’est juste une manière différente d’apprendre ! » s’insurge, Damya qui a obtenu son bac pro "Procédés de la chimie et de l’eau" en 2017 avec mention bien. Si le bac pro continue à avoir mauvaise presse auprès des parents et des enseignants, qui les proposent la plupart du temps aux élèves en difficulté scolaire, certains d’entre eux, en particulier les bacs pro industriels offrent des débouchés très intéressants. «Les industries recrutent et malheureusement nous ne sommes pas toujours en capacité de leur apporter les techniciens dont ils ont besoin. Nous n’arrivons pas à attirer suffisamment d’élèves dans ces voies alors que les débouchés sont nombreux et variés et permettent des parcours professionnels extrêmement intéressants » explique Louisa Mazouz, directrice du lycée Vauquelin à Paris, spécialisée dans les filières industrielles de la chimie et de l'eau.

Damya constate qu’au collège le bac professionnel n’était pas très bien vu et le bac pro industriel méconnu. La conseillère d’orientation lui a d’abord proposé un bac pro commerce. « Moi, j’étais plutôt attirée par les maths et la chimie alors j’ai décidé d’aller voir par moi-même les portes ouvertes des différentes écoles qui proposait un bac pro industriel. » Côté famille, elle doit aussi affronter des réticences. « Ma mère était contente que je trouve une voie qui m’intéresse mais ma famille et mes amis me disaient que je n’allais rien faire de ma vie avec un bac pro, que je resterai au smic toute ma vie, que je ne trouverai pas de travail. Et puis j’ai commencé à leur montrer mes cours et ils ont été très étonnés de ce que j’apprenais, des stages que j’effectuais. Ils n’imaginaient pas que le bac pro pouvait être aussi porteur et ouvrir autant sur le monde professionnel. Cela a complètement changé leur vision de mon orientation » avoue Damya. « Effectivement, les filières industrielles sont mal connues", reconnaît Louisa Mazouz. De ce fait les élèves sont plus souvent orientés vers les lycées professionnels du tertiaire. A nous de faire connaître nos filières et leurs débouchés à nos collègues enseignants et principaux de collèges et lycées. »

Abderrahim a choisi la voie professionnelle après une seconde générale. Souvent absent pour raison de santé, il refuse de redoubler sa seconde. La proviseure l’oriente alors vers une première professionnelle PCE (Procédés de la chimie et de l’eau) . « Au départ, je ne savais pas trop où je mettais les pieds mais très vite les enseignements m’ont beaucoup plu : partir de la matière première pour créer un produit, j’ai trouvé cela passionnant. Ce qui m’a aussi plu ce sont les débouchés. On peut travailler dans des filières industrielles très variées comme les cosmétiques, l’agro-alimentaire, la plasturgie, la pharmacie, le traitement des eaux… », s’enthousiasme Abderrahim. Et visiblement, trouver du travail avec son seul bac pro, n’est pas un problème. Abderrahim, après avoir obtenu son diplôme, se lance dans le monde du travail. « J’ai travaillé 3 ans sans aucun problème. Interim, CDI, j’ai toujours trouvé rapidement un poste. Grâce aux stages, le bac pro nous rend très vite opérationnel sur des fonctions d’opérateur de fabrication ou de production », ajoute-t-il.

Le bac pro n’est pas une fin en soi et aujourd’hui de nombreuses possibilités s’offrent aux élèves qui ont l’envie et les capacités de poursuivre leurs études. « Après avoir obtenu un bac professionnel, on peut tout à fait continuer ses études et nous poussons vraiment les élèves à le faire. Le BTS est une voie d’étude prioritaire pour les bacheliers professionnels et certains élèves peuvent même aller plus loin ! », ajoute Louisa Mazouz. « Après 3 années de travail, je me suis rendu compte que si je voulais évoluer plus vite, je devais reprendre mes études », raconte Abderrahim qui a choisi d’intégrer le BTS "Pilotage des procédés". Damya, quant à elle, s’est orientée vers un BTS Gemeau (gestion et maîtrise de l’eau) en apprentissage après avoir découvert le secteur de l’eau lors de son apprentissage en terminale. « On peut même devenir ingénieur en passant par la voie professionnelle ! C’est un parcours possible aujourd’hui. Le bac pro peut amener les élèves exactement aux mêmes postes que des élèves des voies générales ou technologiques ! », assure Louisa Mazouz.

 

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